Stratégie du conflit, règle n°15 : être juste

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Être juste, dans le conflit, cela signifie attaquer et combattre selon des principes de droit connus à l’avance, plutôt qu’engager le conflit de façon arbitraire et user de ruses déloyales pour gagner à tout prix. Être juste, cela signifie aussi respecter l’adversaire et ne pas outrepasser les limites fixées.

Ce concept de « guerre juste » — ou jus in bello — a été développé par les Romains. L’objectif est double : d’une part, s’assurer le soutien de la population en prétendant défendre une certaine vision de l’Empire romain et en tant que force de civilisation. D’autre part, de ne pas s’aliéner les ennemis vaincus afin de pouvoir rétablir la paix et assurer la domination paisible l’Empire sur les pays occupés.

Naturellement, cette conception de la guerre juste n’était pas sans ambiguïté. En effet, les généraux romains étaient prompts à déceler la perfidie chez l’ennemi. Dès lors que l’ennemi était considéré comme perfide, toute ruse était permise, y compris des procédés qui auraient été considérés comme une perfide s’ils avaient été utilisés par l’ennemi.

Nous pouvons railler cet apparent double jeu manipulateur des Romains. Cependant, conformément à mes habitudes, je préfère chercher cette même tendance dans mes propres habitudes, plutôt que de commenter l’attitude d’autrui.

Citons d’abord au passage une étude qui a montré que plus une personne défend un point de vue, plus elle s’en convainc soi-même. C’est ainsi qu’une cause peut nous sembler légitime et juste à proportion des efforts que nous avons mis dans la bataille, même si, vue de l’extérieur, cette légitimité n’est pas si évidente. Ce qui est juste pour nous ne l’est pas automatiquement du point de vue de notre adversaire et réciproquement.

Vigilance

Mais, quand une cause nous semble juste et importante, nous pouvons oublier de respecter les règles : la fin justifie les moyens. Et l’autre, qui s’oppose à nous et à notre « si belle cause » devient facilement un monstre.

Il n’est néanmoins pas question ici de « cause juste », mais plutôt de façon de mener le combat, conformément à une façon établie à l’avance, par exemple les conventions de Genève actuellement. Ne pas dépasser certaines limites, ne pas se laisser emporter par l’indignation ou la puissance de notre cause. Finalement, plus notre cause est importante, plus nous devons être vigilants si nous voulons mener notre combat de façon juste.

Le propos ici rejoint celui évoqué dans l’article « Monter au balcon », qui dit que nous devons non seulement être engagés dans le combat, mais aussi dans une vision « meta » du combat avec une capacité à analyser nos actes.

Rien moins que ce que les commentateurs sportifs appellent la lucidité (ou son manque), quand des joueurs de sport collectif se mettent à multiplier les fautes et, finalement, jouer contre leur propre camp. À quoi il faut ajouter que trop de fautes et trop de méchant jeu vient non seulement perturber le match, mais aussi la troisième mi-temps et les relations entre les équipes après le match.

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