Conjoncture : la France entre deux eaux

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© Can Stock Photo / focalpoint

Dans son point de conjoncture du mois de mai, l’INSEE souligne que, fort logiquement, l’activité s’est contractée légèrement depuis le début de l’année avec l’adoption de mesures sanitaires de plus en plus restrictives. L’institut statistique souligne que si la consommation a diminué, l’investissement résiste. Ce dernier poursuit son rebond engagé depuis l’été dernier. Au niveau international, l’Europe est économiquement la plus touchée par la deuxième et la troisième vague de l’épidémie. Les États-Unis sous l’effet conjugué des plans de relance et de la campagne de vaccination enregistrent une vive reprise quand la Chine accroît de manière non négligeable ses parts de marché à l’exportation. 

La consommation résiste

Le troisième confinement national mis en œuvre le 3 avril dernier a des effets moindres sur l’activité que les deux précédents. Les restrictions de mobilité ont été un peu limitées, la liste des commerces ouverts ayant été élargie. Selon l’INSEE, pendant ce troisième confinement, la consommation des ménages aurait reculé à 10 % sous son niveau d’avant crise (contre 15  % en novembre 2020 et 31 % en avril 2020). Le commerce en ligne connaît depuis le début de mois d’avril un regain d’activité. Fort logiquement, les ventes en ligne sont nettement au-dessus de leur niveau de 2019 et plus encore qu’en novembre 2020.

Avec l’interdiction des déplacements interrégionaux, l’activité dans l’hébergement/restauration a fortement fléchi en avril. Dans l’hébergement, le recul des dépenses, par rapport à leur niveau de 2019, reste moins fort qu’en novembre 2020. Dans la restauration, il se situe à un niveau comparable. N’ayant pas bénéficié depuis le mois d’octobre de mesures de déconfinement, ce secteur maintient son activité de vente à emporter.

Des goulets d’étranglement et des hausses de prix

Depuis le début de l’année, de plus en plus d’entreprises sont confrontées à des problèmes d’approvisionnement. Cela concerne en premier lieu le secteur du bâtiment et l’industrie. 30 % des entreprises industrielles et 41 % des entreprises du bâtiment se déclarent confrontées à des difficultés d’offre. Le coût des matières premières et de certains biens intermédiaires est orienté à la hausse. Les prix de production de l’industrie française augmentent assez rapidement. Cette évolution doit être relativisée en raison des fortes baisses enregistrées en 2020. L’augmentation de ces coûts et les pénuries pourraient néanmoins conduire dans les prochains mois à une compression des marges des entreprises et à une hausse, au moins ponctuelle, des prix à la consommation.

Un investissement toujours bien orienté

Interrogés au mois d’avril par l’INSEE, les chefs d’entreprise de l’industrie manufacturière prévoient une hausse de 10 % de leurs dépenses d’investissement en 2021. Ce rebond ferait suite à une contraction de 12 % en 2020. L’investissement serait particulièrement dynamique dans la fabrication de biens d’équipement. Les plus forts taux de croissance concerneraient les secteurs de l’agroalimentaire, le textile, la chimie, la pharmacie, et la métallurgie. Dans la fabrication de biens d’équipement, les entreprises sont particulièrement optimistes avec une croissance de leur investissement de +27 % compensant la baisse de 2020. Dans le secteur de la fabrication de matériels de transport, l’investissement rebondirait également en 2021, mais sans compenser sa forte baisse de 2020 (+7 % après -18 %).

Un retour très progressif à la normale

Le PIB en avril aurait été de 6 points inférieur à son niveau d’avant crise, contre 7,5 points au moins de novembre 2020 et 31 points en avril 2020. Avec le déconfinement progressif, le PIB devrait revenir à 3 points de son niveau d’avant crise fin mai et à 2,5 points fin juin. Dans ce contexte, l’INSEE estime que le PIB n’augmenterait que de 0,25 point au deuxième trimestre, faisant suite à une hausse de 0,4 % au premier trimestre. Il se situerait alors à environ 4 % sous son niveau d’avant crise et l’acquis de croissance annuelle serait alors de +4 ¼ % mi-2021.

Les vagues épidémiques provoquent des chutes soudaines et de grande ampleur de l’activité, mais elles sont suivies de rebonds tout aussi importants, à la différence des précédentes qui se caractérisaient davantage par un retour lent à la normale. La forte élasticité de la croissance s’explique par le maintien des revenus des ménages et du tissu productif à travers les mécanismes massifs de soutien.

La normalisation de la situation économique ne sera pas homogène, certains secteurs étant structurellement plus touchés que d’autres. La crise accélère la digitalisation de l’économie. La productivité des facteurs est affectée par le télétravail comme les mesures sanitaires. En avril 2021, près d’une entreprise sur deux déclarait dans les enquêtes de conjoncture de l’INSEE que les dispositifs de protection sanitaire jouaient négativement sur leur productivité. Concernant plus spécifiquement le télétravail, 20 % considéraient qu’il avait un effet défavorable, mais 11 % exprimaient un avis contraire.

Les premières tendances concernant la saison estivale sont plutôt encourageantes. Les réservations sur les côtes atlantique ou méditerranéenne sont plus importantes, les Français privilégiant, comme en 2020, le territoire national. Des établissements sont déjà complets ou presque en Charente Maritime et en Corse. Les annonces de réouverture des restaurants et des activités de loisirs devraient conduire de nombreux Français à organiser leurs vacances d’été dans les prochains jours. Le retour des salons professionnels à compter du 9 juin prochain est attendu en particulier au sein des grandes agglomérations. Le retour du présentiel dans les entreprises à compter du mois de juin devrait amener également un surcroît d’activité.

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