L’agrément ESUS ou comment redonner plus de sens à son métier

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MathildeDufourcq

Peu connu, l’agrément Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale (ESUS) s’avère un levier efficace pour engager son entreprise sur la voie d’un développement qui pose la solidarité comme finalité. Témoignage de Mathilde Dufourcq qui a franchi le pas.

Issue de deux générations de professionnels de l’assurance, Mathilde Dufourcq reprend en 2011 avec son frère Julien l’entreprise familiale, le groupe APS Prévoyance situé à Avignon, spécialisé dans le courtage en assurance. Ses spécificités ? Proposer un seul produit, une complémentaire santé, et avoir le statut de courtier délégataire, qui gère les dossiers pour les assurances. « Dès sa création en 1985, l’entreprise se développe sur le principe originel de l’assurance : organiser la solidarité entre les personnes. Le fait d’être regroupés permet en effet à des publics vulnérables, malades ou sous le seuil de pauvreté, de bénéficier d’une mutuelle à des conditions négociées». Aujourd’hui, le groupe APS Prévoyance couvre 45 000 personnes dans toute la France.

RETOUR AUX SOURCES DE L’ASSURANCE

Pour Mathilde Dufourcq, revenir aux valeurs fondatrices de l’assurance est une évidence : l’humanisme et la solidarité en tête. Une autre valeur clé est l’innovation, au service d’une même mission : soutenir les personnes en situation de vulnérabilité. Dans cette optique, le groupe APS Prévoyance se lance fin 2017 dans deux démarches simultanées : le statut ESUS, Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale, et la labellisation LUCIE. « L’agrément ESUS est totalement dans la continuité de ce que l’on fait depuis des années. Si on a voulu le figer dans le marbre, c’est-à-dire l’inscrire dans les statuts et dans notre objet social, c’est pour donner encore plus de sens à notre métier. Ensuite, les critères de l’ESS nous les avions déjà adoptés : réinvestir la moitié des bénéfices dans l’entreprise, une gouvernance incluant les parties prenantes, un métier lié à la solidarité ainsi que la limitation des salaires des dirigeants. »

UN VOLET ADMINISTRATIF

Pour la mise en conformité des statuts, Mathilde Dufourcq fait appel à un avocat-conseil. Cette formalité administrative est ainsi plus complexe qu’il n’y paraît. Par exemple, pour la limitation des salaires des dirigeants, il ne s’agit pas de plafonner en fonction des salaires les plus bas au sein de l’entreprise concernée, mais en fonction du minimum salarial de la branche. « Un nivellement par le haut serait bien plus pertinent ! D’une manière générale, le côté administratif est contraignant, c’est à la virgule près. De plus, l’attribution de l’agrément se fait par silence. C’est-à-dire qu’après instruction par la DIRECCTE et envoi du dossier à la Préfecture, celle-ci garde le silence pendant 2 mois et c’est bon, on a l’agrément. Drôle de façon de valoriser la démarche !» Depuis l’obtention de l’agrément à l’été 2018, la prochaine étape pour le groupe APS Prévoyance est la création en 2019 d’un fonds de dotation, destiné à soutenir des projets en faveur de la santé et du bien-être des populations en difficulté.

RSE ET ESS, MEME COMBAT

En parallèle, début 2018, le groupe initie une démarche de labellisation LUCIE, afin d’accompagner le déploiement de sa stratégie RSE. Dans ce cadre, des actions sont mises en place, parmi elles : des groupes de travail en interne, une réflexion sur le bien-être dans l’entreprise, la création d’une newsletter dédiée aux équipes. « Pour nous, les démarches ESUS et RSE sont complémentaires. Le statut ESUS s’adresse plutôt les parties prenantes externes de l’entreprise, tandis que la RSE impacte davantage, à mon sens, le quotidien des collaborateurs. D’ailleurs, tous ressentent une grande fierté et soutiennent le projet solidaire de l’entreprise. Ensuite, évidemment, il y a toujours un besoin de formation des équipes sur ces sujets. » Fort d’une équipe de 48 collaborateurs, le groupe prévoit le recrutement de 10 personnes début 2019.

Côté partenaires prescripteurs, tels que les CCAS, les assistantes sociales ou les associations tutélaires, le statut ESUS est vu d’un très bon œil. Pour le grand public et le monde politique en revanche, le monde de l’ESS est encore mal connu. Plutôt que de créer le statut de l’entreprise à mission, pourquoi n’avoir pas fait évoluer le statut ESUS en intégrant des thèmes comme l’écologie. « Quel que soit le terme, les entreprises se doivent d’être responsables. Une entreprise qui dure, c’est une entreprise qui a du sens et une vision à long terme. ESS, RSE ou autre, dans tous les cas, il faut foncer !»

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