Râler, c’est mauvais pour la santé

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© Can Stock Photo / fizkes

Le président de la Confédération helvétique, Johann Schneider Ammann, avait fait en 2016 un discours remarqué à l’occasion de la journée des malades, sur le thème : « Rire, c’est bon pour la santé ». Il avait fait forte impression en parlant du rire avec un flegme digne de Buster Keaton. Je lui dédie humblement le présent texte, sur le thème : râler, c’est mauvais pour la santé. Et je vais, comme lui, tâcher de le faire sans râler moi-même.

Vous n’êtes pas d’accord avec le gouvernement. Soit ! Ce pourrait peut-être avec votre patron, si vous en avez un. Ce pourrait être avec un client, un fournisseur ou tout simplement un voisin. L’important, pour mon exposé, c’est qu’il s’agisse de quelqu’un avec qui vous ne pouvez pas vous expliquer directement. Soit qu’il soit trop loin ou trop puissant.

Résultat : vous protestez. Vous allez, puisqu’il s’agit du gouvernement, vous indigner sur les réseaux sociaux. À quoi cela sert-il ? En quoi cela change-t-il la situation ? À rien et en rien. Au mieux, vous trouvez quelque comparse qui partage votre avis et cela met un peu de baume au cœur. Mais du baume au cœur qui vous renforce dans vos convictions, voire dans votre colère. Hélas cependant, vous savez en votre for intérieur que cela ne change rien du tout. Ce qui pourrait augmenter encore votre ressentiment

Sentiment d’impuissance

Les médecins autrefois appelaient cela des humeurs bilieuses. Parce que, en effet, cela n’est pas sans impact sur votre santé, de maugréer de la sorte, vous consommez des années d’espérance de vie. Peut-être quelque cynique pourrait-il dire que c’est tant mieux : cela sera autant d’éclat de voix et de folie que vous épargnerez à vos semblables.

Et encore, je n’envisage que le scénario le plus bénin. Mais il se pourrait bien que cette colère fasse boule de neige, qu’elle s’accumule, qu’elle forme des concrétions et finisse par rendre impossible tout rapport paisible avec d’éventuels contradicteurs.

Pareils comportements remplissent aujourd’hui notre quotidien : le gouvernement aurait dû… Le gouvernement n’a pas fait ceci, n’a pas fait cela. Et pourquoi donc ? Puisque manifestement, vous saviez ce qu’il aurait dû faire. Pourquoi donc n’êtes-vous pas intervenus ? Parce que vous comme moi ne sommes rien, nous ne sommes que les spectateurs de la grande tectonique des plaques du monde. Que notre parole ne compte guère, pas plus qu’un bulletin de vote de temps en temps. Mais peut-être que c’est d’être impuissant qui nous met de si méchante humeur.

De simples spectateurs

C’est ainsi que râler est un moyen de dire au monde que nous ne pouvons rien changer à la situation qui nous chagrine. Se vanter de sa faiblesse, en somme. Car le pourrions-nous, influer sur l’état du monde, que nous nous comporterions tout autrement. Non seulement l’action dissoudrait nos humeurs bilieuses, mais, de plus, la responsabilité nous ferait voir la situation tout autrement, disons-le, avec plus de modestie et de mesure. Encore que certains dirigeants mondiaux me contredisent immédiatement par leur comportement… Mais vous n’êtes pas de ce genre-là, n’est-ce pas, car vous avez le sens des responsabilités ?

En somme, râler est inutile, contagieux, nous gâche des moments de notre vie… Et surtout, alors que vous et moi sommes des gens respectables, nous fait apparaître au monde pour de simples spectateurs et non pour les acteurs que, bien souvent, nous aspirons à être.

Râler, vous dis-je, c’est mauvais pour la santé.

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