La confiance chez les Francophones

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Drapeau de la Francophonie

Où allons-nous? La réponse découlera largement du niveau de confiance dans nos sociétés. De la confiance dépend notre capacité à maîtriser la pandémie partout aggravée par la méfiance envers les consignes de sécurité. Mais la résistance de nos démocraties aux poussées populistes et totalitaires est aussi tributaire de la confiance. L’économie également, car les performances des entreprises seraient, dans la durée, bien meilleures si le management par la méfiance régressait et si les consommateurs avaient plus de confiance dans l’offre.

Dans ce contexte, l‘Institut de la confiance dans les organisations (ICO), créé à Montréal par l’avocat Donald Riendeau, a pris une initiative utile en publiant le premier Indice de la confiance sociétale trimestriel pour le Québec[1]. Le suivant paraîtra début septembre. Cet indice sera étendu à d’autres pays. Le CJD québécois est directement concerné et, plus généralement, l’examen de cet Indice nous donne l’occasion de nous poser de bonnes questions.

Il apparaît que les Québécois, en majorité, croient que leur société respecte les principes d’honnêteté, de responsabilité citoyenne, d’égalité des chances  et aussi de recherche de performance ; mais plus de 40% d’entre eux sont critiques sur la répartition des richesses. Ils se déclarent massivement (84%) respectueux envers les autres, envers les lois et règlements, avec un engagement social personnel ressenti comme « faible » par un quart et « élevé » par un autre quart de la population adulte.

Confiance forte dans le gouvernement provincial

L’indice de la confiance québécois était, fin mai, de 63,74 % à l’égard des institutions, 70,87 % pour la confiance interpersonnelle et 71,55 % envers les organisations. Ainsi, les Québécois faisaient-ils largement confiance aux autorités pour leur fournir en cas de crise grave les abris, la nourriture, les médicaments et vêtements de protection nécessaires. Les Québécois avaient plus confiance dans leur gouvernement provincial que dans le gouvernement fédéral ou leur municipalité et étaient nettement plus satisfaits de la gestion de la pandémie au niveau du Québec qu’à ceux fédéraux et municipaux. Quant à la gestion américaine, elle est massivement désapprouvée. Une enquête, menée en avril, dans l’ensemble du Canada[2] montrait également une confiance un peu plus forte dans les gouvernements provinciaux (69,2%) que dans les maires (66,8%) et le gouvernement fédéral (67,8%).

En Belgique et en France, la confiance diminue graduellement quand l’on passe du maire aux niveaux plus éloignés du terrain, région, gouvernement national, Union européenne. On observe l’inverse au Royaume-Uni. La France se distingue par une faible confiance dans son gouvernement[3].

Les forces armées sont l’institution qui inspire le plus de confiance aux Québécois, devant l’Education, la Santé et les PME, ex-aequo, juste devant la presse et les organismes sans but lucratif. Les grandes entreprises privées et surtout les syndicats et les médias sociaux inspirent peu de confiance à une partie importante, quoique minoritaire, de citoyens. On retrouve des classifications analogues en France, Allemagne et Royaume-Uni. Les PME ont partout les faveurs du public, loin devant les grandes entreprises privées.

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Tableau 1: Confiance des Québécois dans les différents niveaux de l’Etat (ICO)
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Tableau 2: Confiance des Québécois dans différentes institutions
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Tableau 3. Confiance des Français, Allemands et Britanniques dans différentes institutions
(Source : Baromètre de la confiance politique, Avril 2020. OpinionWay)

30% des Québécois étaient pessimistes pour l’avenir économique de leur pays, 64% optimistes. Les deux tiers des Québécois (68%) avaient confiance en leur avenir financier à court et long terme, mais ceux qui trouvaient que leur niveau de vie se détériorait étaient plus nombreux (29%) que ceux qui pensaient l’inverse (20); la moitié ne notait pas de changement. Les trois-quarts étaient confiants envers l’avenir de leurs enfants sur les plans personnels et professionnels.

Confiance dans la famille

Leur confiance en eux-mêmes était faible pour 11% des réponses, moyenne pour 40%, élevée pour 49%. Ils étaient très confiants en leur conjoint(e), leurs enfants (90%), un peu moins pour leurs parents (86%), leurs frères et sœurs (82%), les amis (78%), les voisins (66%), les étrangers (54%) et les inconnus (52%). C’est très proche des niveaux de confiance interpersonnelle français, allemands et britanniques (tableau 2). Les deux tiers des Français affirmaient cependant « qu’on n’est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres », contre 51% des Allemands et 47% des Britanniques. 55% des Québécois se déclarent « généralement confiants  » envers les gens, les « méfiants » seraient 28%. Mais en cas de perte de leur portefeuille, 27% des Québécois seulement pensaient qu’un inconnu le leur rapporterait, 41% croyaient le contraire.

Ces indications sur la confiance envers les autres sont importantes pour évaluer le potentiel des mouvements populistes de droite. Ceux-ci, en effet, recrutent surtout des personnes en mal-être et très méfiantes envers les autres, pas seulement envers les étrangers[4].

Dans le cadre professionnel, une confiance « élevée » décroissante était accordée aux collègues (59%), au « gestionnaire immédiat » (55%), au « dirigeant de votre organisation »(44%) et à « vos employés »(31%), ce qui se retrouve dans les autres pays. Pour un tiers environ, ces confiances n’étaient que « moyennes », ce qui devrait inciter les directions à améliorer leur management. La confiance envers les directions était « faible » dans 16% des organisations. Dans cette fraction non négligeable des entreprises et peut-être des administrations, des mesures s’imposent d’urgence.

L’évolution de l’ensemble de ces indications, entre mai et la fin de l’été, sera instructive pour évaluer nos capacités à gérer de notre crise globale dans les prochains mois. Rendez-vous en septembre.



[1] 1000 adultes ont été interrogés en ligne par BIP Recherche entre les 22 et 27 mai 2020.

[2] Ruth Dassonneville, Éric Bélanger, Jean-François Daoust, Richard Nadeau & Erick Lachapelle. Citizens’ Attitudes Under the COVID-19 Pandemic. Canada (wave 1)

[3] En qu(o)i les Français ont-ils confiance aujourd’hui. Baromètre de la confiance politique. Vague 11bis. Avril 2020. Opinionway. SciencesPo-Cevipof.

[4] Les Origines du populisme. Enquête sur un schisme politique et social.

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