Omni : une fixation pour utiliser les trottinettes électriques en fauteuil roulant

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Charlotte – Ville, malgré la Covid

L’idée semble tellement simple après coup, mais fallait-il encore y penser ! Fixer une trottinette électrique à un fauteuil roulant, c’est le concept génial développé, autour de Charlotte, par quatre jeunes ingénieurs.

L’idée est née d’une rencontre en janvier 2018. D’un côté quatre jeunes ingénieurs, Noé Vinot-Kahn (Ponts), Sulivan Richard (UTC Compiègne), Robin Lhommeau (Arts & Métiers) et Mathieu Izaute (Mines d’Albi) qui choisissent de suivre, à l’issue de leurs études et pendant un an, une formation en innovation centrée utilisateurs (Design Thinking) à la d.school Paris. Leur feuille de route établie dans le cadre de cette formation par la fondation Safran pour l’insertion, stipulait qu’ils devaient réfléchir à un dispositif permettant d’améliorer la mobilité des handicapés moteurs. De l’autre côté, Charlotte Alaux diplômée de l’école de commerce EMLV et salariée dans le service RH de la société MBDA une filiale d’Airbus, clouée dans un fauteuil roulant depuis l’âge de quatre ans. Conformément à leur feuille de route, les quatre garçons ont d’abord cherché à identifier les besoins avant de proposer une solution, et ont passé beaucoup de temps à analyser et approfondir les attentes. « Tous les quatre ont interrogé une vingtaine d’experts médicaux, et je faisais partie de la cinquantaine de personnes en fauteuil qu’ils ont rencontrées, explique Charlotte Alaux. Ils ont accepté de passer des journées entières en fauteuil roulant afin de ressentir les difficultés et les lacunes de ce moyen de transport. Il est en effet difficile de se déplacer en ville, il y a la hauteur des trottoirs, les pavés, les côtes à gravir, les transports en commun peu accessibles… sans compter les troubles musculo-squelettiques encourus au niveau des épaules. Bien sûr la motorisation existe sur les fauteuils, mais elle coûte très cher. » Forts de leur expérience, les quatre garçons, aidés par Charlotte, se mettent à réfléchir à des solutions.

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Le rêve d’enfant de Charlotte

Un rêve d’enfant

Rapidement, ils prototypent et testent une quinzaine d’idées. Rien de suffisamment performant notamment parce que la plupart des utilisateurs qu’ils avaient rencontrés, souhaitaient limiter les achats de matériel spécialisé et préféraient adapter des solutions ou produits existants. Et puis un jour, c’est le déclic. Un fauteuil roulant mécanique ? Une trottinette électrique ? Et si l’une servait à l’autre pour devenir électrique ? Pour Charlotte, l’idée est pleine de promesses. « Avoir accès au même produit que les autres, me mouvoir avec le même engin de déplacement que tout le monde, pouvoir utiliser les mêmes pistes que les vélos. Pouvoir suivre ma famille, mes amis en balade, pouvoir vivre avec les autres, c’était vraiment un rêve d’enfant qui se réalisait. J’étais submergée par mes émotions. »

Il aura fallu deux ans et toute l’ingéniosité des jeunes gens pour mettre au point une solution universelle, GlobeTrotter, un système de fixation permettant d’accrocher une trottinette électrique à un fauteuil roulant et s’adaptant à la plupart des modèles de fauteuils mécaniques.

« Au départ, reconnaît Charlotte, je ne m’imaginais pas devenir entrepreneur, mais notre produit était tellement novateur et répondait à un vrai besoin qu’il ne pouvait pas rester à l’état de finalisation d’un projet étudiant. Du coup, nous avons tous les cinq décidé de créer notre entreprise et de l’appeler Omni en référence au préfixe latin qui signifie “tout”. Omni est un terme inclusif, nos produits sont et seront pour tout le monde. » Dès son démarrage, la start-up bénéficie du soutien financier et logistique de la fondation Safran, d’aides et de subventions. Le produit est prêt, ne reste plus qu’à faire connaître GlobeTrotter. Avec l’aide de Charlotte qui apporte à l’entreprise ses compétences en matière de marketing et de communication, ce sera chose faite via les réseaux sociaux, la presse, les associations et clubs handisport.

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Charlotte Alaux, GlobeTrotter loisir

Leur projet préféré ? C’est le prochain…

Depuis quelques mois, GlobeTrotter est en vente sur le site Internet de l’entreprise et en phase de test dans un réseau de vendeurs de matériel médical et de trottinettes électriques. Fabriquée dans le nord de la France, assemblée dans un ESAT (Etablissement et service d’aide par le travail), la fixation coûte cinq-cent — quatre-vingt-dix euros. D’ici un an, la toute jeune entreprise espère l’exporter aux Etats-Unis et en Europe. « Nous avons passé un partenariat avec un fabricant de trottinettes pour améliorer le confort de conduite afin que le guidon soit plus proche de l’utilisateur ; les trottinettes “améliorées” sont vendues sur notre site Internet. A l‘avenir, nous souhaiterions rendre accessibles à notre système de fixation celles partagées, qui sont dans vos villes. En effet, elles sont trop lourdes et les guidons sont trop hauts. Nous étudions aussi les partenariats possibles en vue des Jeux paralympiques de 2024 et avons désormais un projet plus politique. Obtenir la même subvention pour cet équipement que celle accordée aux valides pour l’achat d’un vélo électrique. Nous avons commencé à tirer les sonnettes en rappelant que la France compte plus d’un million quatre cent mille utilisateurs de fauteuils roulants »

Pour conclure, s’il est une réflexion que Charlotte n’oubliera jamais, c’est celle des utilisateurs de pistes cyclables qui, intrigués positivement par la motorisation de son fauteuil roulant, lui expliquent souvent qu’ils aimeraient bien l’essayer. Une inversion des rôles qui ne lui était jamais arrivée.

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