Nos deux priorités : l’emploi et les gains de productivité

Après l’élection présidentielle, la France doit faire face à une série de chocs extérieurs dans un contexte de finances publiques dégradées et de déficit commercial préoccupant. Les marges de manœuvre des pouvoirs publics sont faibles compte tenu du niveau élevé des dépenses et des prélèvements obligatoires.

Les dépenses publiques sont amenées à augmenter afin de financer les retraites, la santé, la dépendance, la transition énergétique, la formation, la digitalisation, etc. Les solutions sont limitées. Elles consistent essentiellement à jouer sur le taux d’emploi et la productivité. L’un et l’autre supposent un effort de formation conséquent et une augmentation de l’investissement. Pour être acceptable, cette politique doit s’accompagner d’une réduction des inégalités tant sociales que géographiques.

La nécessaire augmentation du taux d’emploi

Le taux d’emploi est faible en France par rapport aux autres États européens. Il est de plus de 10 points inférieurs à celui enregistré en Allemagne. Il s’élève à 62 % contre 74 % en Allemagne. La faiblesse du taux d’emploi est liée à un nombre important de jeunes de moins de 25 ans sans emploi et sans formation et à un départ précoce à la retraite. Plus du quart du déficit d’emplois entre la France et l’Allemagne s’explique par le taux d’emploi des plus de 60 ans qui est de 38 % en France, contre plus de 60 % en Allemagne. Ce taux atteint 70 % en Suède et 55 % au Royaume-Uni. En France, l’âge moyen de départ à la retraite est pour le régime général de 62,8 ans.

La France souffre d’une main d’œuvre insuffisamment formée, ce qui pénalise l’emploi. Cette faiblesse conduit à une surreprésentation des emplois à faible qualification. La France en compte deux fois plus que l’Allemagne. Selon le classement PIAAC de l’OCDE, la France se classe au 21e rang loin derrière le Japon, la Finlande, la Corée du Sud et les Pays-Bas. Pour les sciences, la France, selon l’enquête TIMSS, se situe à dans le bas du classement juste devant la Roumanie. Si l’Allemagne a réussi à améliorer ses positions lors de ces vingt dernières années, la France n’a pas réussi à redresser les siennes. La France se caractérise par le poids élevé de ses cotisations sociales et de ses impôts de production qui représentent 13 % du PIB, contre moins de 8 % en Allemagne et 9 % pour la zone euro (hors France).

Pour les pays de l’OCDE, une corrélation forte existe entre d’une part le taux d’emploi, le taux d’emploi des plus de 60 ans, les compétences de la population active et les compétences en sciences des jeunes et, d’autre part, le poids des impôts de production et des cotisations sociales des entreprises.

Pour améliorer le taux d’emploi, les pouvoirs publics peuvent déplacer le curseur de l’âge de départ à la retraite. Le passage de 60 à 62 ans a conduit à une hausse sensible du taux d’emploi des plus de 55 ans. L’amélioration des compétences des jeunes (surtout en sciences) et des adultes est une autre solution, mais qui nécessite du temps. L’amélioration du taux d’emploi accroîtra les recettes fiscales et réduira les dépenses. Si le taux d’emploi était le même en France qu’en Allemagne, les recettes fiscales seraient, toutes choses égales par ailleurs, 4 points de PIB plus élevés. Avec un taux d’emploi plus élevé, les inégalités sociales seraient moins élevées, permettant une diminution des dépenses de transferts. Celles de retraites seraient également plus faibles. En revanche, les dépenses liées au risque prévoyance (incapacité, handicap) augmenteraient.

Pour pouvoir proposer des emplois qualifiés, en parallèle, un effort d’investissement devrait être entrepris de la part des acteurs publics et privés. La réindustrialisation suppose que les collectivités locales acceptent l’implantation d’usines. La création de nouvelles activités industrielles permettrait de réduire l’imposant déficit commercial. La transition énergétique donne la possibilité aux entreprises de se développer sur ce nouveau secteur d’activité à fortes marges. La France se doit de réduire l’écart avec l’Allemagne. La valeur ajourée manufacturière représente 9 % du PIB pour la première et 20 % pour la seconde.

La transition énergétique suppose un supplément d’investissement d’au moins quatre points de PIB. La mobilisation de l’État soit s’accompagner celle des investisseurs pour éviter une progression des dépenses publiques, sachant que l’État sera appelé à compenser une partie des inégalités sociales que génère la transition énergétique. 

Les entreprises françaises devront réaliser des innovations de rupture afin de respecter les Accords de Paris sur les émissions de gaz à effet de serre et pour compenser les surcoûts provoqués par la hausse des coûts de production. Une augmentation du nombre de logements construits chaque année est par ailleurs indispensable pour préserver le pouvoir d’achat des ménages.


Crédit Photo : ELEVATE – Pexels

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