Travail : la fin du « no pain, no gain »

Faites-vous partie de ces dirigeants qui déplorent la relation que les jeunes entretiennent avec le travail ? C’est peut-être le cas. Rassurez-vous : ce n’est pas qu’un simple sentiment. Oui, les jeunes entretiennent une relation vis-à-vis du travail qui diffère sensiblement de celles de leurs aînés. Et voilà en quoi.

« Il faut en baver pour réussir ». « No pain, no gain ». » Il faut avoir fait ses armes sur le terrain pour prétendre ensuite aux postes de managers ». « L’avancement s’obtient au mérite, à l’ancienneté ». Voilà quelques représentations du monde d’avant, encore prégnant dans beaucoup d’organisations. Pas étonnant que ces dernières soient fortement déstabilisées avec l’irruption en leur sein de la Génération Z., car cette Génération Z possède un logiciel bien différent. Bien entendu, si ce logiciel est propre à la Génération Z, il ne lui est pas exclusif. La manière de penser de la Génération Z contamine celle des générations précédentes. Aussi n’est-il pas rare aujourd’hui de la retrouver chez les Générations X et Y.

Une des caractéristiques fondamentales du travail dans le monde d’avant, c’est sa pénibilité. On retrouve cette signification de contrainte dans l’étymologie latine du mot travail, « tripallium », qui désigne à l’origine un trépied pour ferrer les chevaux et les bœufs, puis un instrument de torture. Le nom « travailleor » qui donnera travailleur désignait celui qui « travaillait » les membres du condamné. Dans la tradition judéo-chrétienne, le travail est considéré comme le châtiment consécutif au péché originel. Adam et Eve, en goûtant au fruit de l’arbre de la connaissance, ont désobéi. Dieu condamne Eve à enfanter dans la douleur et Adam à devoir travailler pour assurer leur subsistance (« tu mangeras ton pain à la sueur de ton front »).

On mesure facilement ici le poids de cette tradition sur notre façon d’envisager le travail. Le travail revêt une nécessité, il est un devoir. Les principes du monde d’hier au travail peuvent être résumés par les mots suivants : hiérarchie, engagement, rémunération, statut, résultat, fidélité, protection, sécurité, mérite… L’important est le long terme.

Les managers ont du boulot !

Ce modèle doloriste vole aujourd’hui en éclat. Les nouvelles générations voient le travail avant tout comme le moyen de réaliser leurs aspirations ; celles-ci veulent créer une œuvre de vie dont le travail est un élément, parfois une option. Les nouvelles générations ne sont pas « anti-travail », encore moins fainéantes ; celles et ceux qui la composent ne sont tout simplement plus inconditionnellement « pro-travail ». La logique du court terme devient dominante. Les nouvelles générations ne se projettent plus dans l’entreprise, elles renoncent à l’idée de faire carrière. Elles ne cherchent plus à faire leurs preuves dans l’entreprise ; c’est à l’entreprise de démonter en quoi elle peut servir le projet professionnel et personnel des intéressés.

Voilà qui complexifie grandement les choses, car l’idéologie ancienne agissait puissamment pour enrôler les individus dans la dynamique de l’entreprise.

Si le travail n’est plus une nécessité, mais un élément parmi d’autres qui doit faire sens, comment créer un collectif capable de servir les intérêts de l’entreprise ? Tout le travail du management va consister à trouver de bonnes raisons pour que les femmes et les hommes dans leur diversité aient un intérêt à rejoindre l’entreprise et à y rester.


Crédit Photo de fauxels – Pexels

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