Le management chez Netflix (6) : les 4 étapes de la roue du succès de l’innovation

Netflix est incontestablement une société innovante. Créée en 1997, Netflix a révolutionné l’industrie de la distribution et de la production audiovisuelle par sa créativité et sa technologie. Mais quelle est la recette de ce succès ? Reed Hastings dénombre 4 étapes permettant de manager l’innovation.

1 — Cultiver le dialogue contradictoire

Chez Netflix – on le sait maintenant — la franchise est de mise. Si quelqu’un entre dans votre bureau en vous soumettant une idée, votre rôle ne consiste pas à la démolir, encore moins de feindre de la trouver géniale. Votre devoir est d’apporter un feedback constructif, proposer des arguments visant à éclairer la situation. L’important n’est pas de ménager son interlocuteur, mais de contribuer à l’intérêt de l’entreprise.

Ce qui vaut pour les salariés vaut aussi pour le patron lui-même. Si celui-ci a une idée de développement l’entreprise et si des salariés ont des arguments à opposer, ces derniers ne doivent pas se gêner pour l’en informer.

La contradiction peut être apportée partout, sur tous les sujets, à tous les échelons de l’entreprise.

Bien entendu, tout cela est très joli sur le papier, mais dans la vraie vie… Les individus ont généralement tendance à suivre le troupeau plutôt que de proposer une idée originale qui peut être contestée, voire raillée. Et puis s’opposer frontalement à l’avis du chef, cela peut coûter cher… Mais quand la confiance est le terreau de l’entreprise, il est possible de mettre en place des systèmes qui assurent la prise en compte des désaccords. « Plus on cultive les désaccords et plus on encourage les gens à exprimer ouvertement leurs divergences, meilleures sont les décisions prises au sein de l’entreprise. C’est vrai pour toutes, quelle que soit leur taille, quel que soit leur domaine. »

Pour les initiatives plus confidentielles, celles qui ne nécessitent pas forcément un dialogue contradictoire, il est nécessaire d’en informer les uns et les autres pour partager l’idée et recueillir les réactions. On peut avoir une idée géniale a priori qui, une fois confrontée à deux ou trois points de vue extérieurs, se modifie ou est abandonnée rapidement. L’important ici est de ne pas rester dans sa tour d’Ivoire, de libérer l’expression et les initiatives.

2 — Tester l’idée

En quoi est-ce réellement original ? Aujourd’hui on ne parle que d’expérimentation avant toute généralisation. Avant de déployer une idée, il importe de la soumettre à l’épreuve du réel. C’est devenu une règle communément admise au sein des entreprises.

Mais à quoi tient la spécificité de Netflix sur ce sujet ? Tout simplement au fait que l’idée est testée même si les responsables y sont opposés.

En 2015, il était impossible de télécharger les séries sur Netflix. Impossible donc de visionner sa série préférée dans un avion. Neil Hunt, directeur général des produits à l’époque, était opposé à l’offre de téléchargement. Reed Hastings l’était également, préférant se focaliser sur le streaming. Mais un salarié a émis l’idée qu’il serait peut-être bon de proposer rapidement cette fonctionnalité aux clients. Fausse bonne idée pour Hastings au prétexte que le téléchargement viendrait complexifier l’expérience client.

En général, quand un salarié un peu malin voit son avis contesté par le boss lui-même, il n’y revient pas. Pas chez Netflix. L’idée a été testée. Résultat après étude : la fonctionnalité concernant le téléchargement est indispensable. Le streaming est en effet une technologie très efficace quand la connexion internet est puissante et fiable partout sur la planète. Ce qui est loin, très loin d’être le cas. Comment peut-on se prévaloir d’ambitions mondiales comme Netflix et se passer d’une telle fonctionnalité ? En Inde par exemple, mais aussi dans d’autres pays comme l’Allemagne, le téléchargement des films et séries est la norme, compte tenu de la qualité des connexions internet. Voilà comment la direction Netflix réticente à une idée a été convaincue de sa pertinence et même de sa nécessité.

3 — Le « capitaine informé » doit se lancer

Le « capitaine informé », à savoir la personne qui a eu l’idée et l’a testée, a aussi la responsabilité de suivre son déploiement. Là aussi, pas besoin de validation de la hiérarchie. Au capitaine informé de négocier les contrats, quel que soit leur montant. Liberté complète de décision.

« La personne qui vit et respire ce contrat doit être la personne qui le signe et l’assume et pas un chef de service ou un vice-président. C’est une manière d’enlever la responsabilité du projet à la personne qui devrait en être responsable. »

Reed Hastings

Le cycle en 4 étapes de l’innovation chez Netflix, après contribution des autres, appelle à une prise de décision individuelle.

4 – Célébrer les succès, apprendre des échecs.

En cas de succès, il est important de marquer le coup. Le succès, s’il est célébré, va inciter d’autres salariés à partager leurs idées.

Mais le succès n’est pas toujours au rendez-vous. Dans ce cas, il est important de ne pas reléguer le projet en sujet tabou. Trois réactions sont encouragées chez Netflix :

  • Recueillir les enseignements tirés de ce projet ?
  • Ne pas en faire toute une histoire, relativiser.
  • Ouvrir les débats sur cet échec.

L’objectif ici est de ne pas brider l’expression des salariés, de reconnaître le leadership de ceux qui osent.

On cherche à tirer des leçons, pas à montrer du doigt un coupable. Ce n’est pas le salarié qui a échoué, mais son projet. Il importe de faire la distinction entre les deux. Concrètement, le salarié concerné est invité à écrire un rapport public qui circulera librement, en toute transparence. Un échec n’est qu’un pari raté, mais l’équipe reste gagnante, car elle tire les leçons du projet. « Les paris ratés sont une partie inhérente de la roue du succès de l’innovation. Nous ne devrions pas avoir peur de nos erreurs. Nous devrions les chérir ».


Photo de Nicolas – Pexels

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