« Notre système repose sur des fondations qu’on a le droit – et même le devoir – d’interroger »

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Julien Da Costa

Les Universités de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération se tiennent les 6 et 7 octobre à Saint-Etienne. Julien Da Costa, président de l’Institut Européen de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération (IE-EFC), évoque le travail de l’Institut pour changer notre regard sur l’économie et inventer de nouveaux modèles plus vertueux.

En quelques mots, qui êtes-vous et quels sont vos engagements ?

Je suis entrepreneur, dirigeant de Flex’ink qui propose une solution d’impression innovante, économique et responsable. Je suis membre du Centre des Jeunes Dirigeants d’entreprise (CJD) et Co-Délégué National du nouveau copil Coopération. Depuis mars 2022, je préside l’Institut Européen de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération, un organisme qui soutient la coopération entre les acteurs engagés dans l’économie de la fonctionnalité. L’Institut a pour mission de répondre aux enjeux de transition vers un modèle de développement durable à l’échelle des entreprises et des territoires. Il vise à ouvrir de nouvelles possibilités d’action pour répondre aux limites et impasses du modèle productiviste, industriel et financiarisé. Nous attachons une attention particulière au travail des personnes et aux territoires, là où se crée une part essentielle de la valeur.

L’institut travaille actuellement sur une fresque de l’économie. De quoi s’agit-il au juste ?

Notre système repose sur des fondations qu’on a le droit – et même le devoir – d’interroger. Cette fresque permet de poser sur notre économie un regard différent et de questionner le modèle de nos entreprises. L’objectif final est de remettre en cause les habitudes et modes de pensée implicites pour agir autrement et développer des modèles d’entreprises plus vertueux. Intéressons-nous par exemple à la logique volumique, un principe de notre économie actuelle : pour vendre plus et accroître sa rentabilité, une entreprise doit vendre plus d’unités de produits ou de services. Or cela a un coût. Un coût humain d’abord, car les salariés sont contraints de travailler plus. Un coût en matière d’investissements, car cela nécessite souvent l’achat de machines coûteuses. Un coût environnemental enfin, car ce mode économique est énergivore et conduit trop souvent à la surconsommation et au gaspillage. C’est particulièrement le cas dans un secteur que je connais bien, à savoir celui de l’imprimerie. C’est aussi le cas dans l’agriculture. La valeur d’un légume, ce n’est pas simplement son prix. C’est aussi la reconnaissance du travail de l’agriculteur et de ses salariés, l’implication dans l’économie locale, la sauvegarde de la biodiversité, la préservation des sols… Tout cela doit être valorisé. C’est aussi cela que nous achetons. Bref, certains principes au fondement de notre économie déterminent nos modes de fonctionnement. Ils sont à l’origine des problèmes environnementaux et sociaux actuels.

La fresque de l’économie révèle ces principes au grand jour et montre qu’une autre économie est possible, que d’autres modèles peuvent être expérimentés à partir d’autres principes.

Il n’y a pas de réponses toutes faites. Nous ne donnons pas de recettes pour y arriver, seulement des outils pour questionner l’entreprise en profondeur et lui permettre de se réinventer. La fresque est l’occasion de porter collectivement ces enjeux et de travailler en coopération avec des économistes, ergonomes, directeurs et membres de clubs locaux et chefs d’entreprise. La coopération permet la pertinence du processus de création et l’appropriation du travail sur l’ensemble des territoires.

Comment cette fresque va-t-elle être déployée ?

Comme pour la fresque du climat, cette fresque va servir de support dans des ateliers qui réuniront entrepreneurs, citoyens, collectivités, élèves pour les sensibiliser au fait qu’il est possible de changer de cadre de référence. Nombreux sont ceux qui veulent agir, mais qui ne savent pas par quoi commencer. Il faut commencer par se poser les bonnes questions. La fresque est une occasion de mettre tous les acteurs locaux partout en France autour d’une table pour engager la transition écologique. Les 6 et 7 octobre prochains à Saint-Etienne auront lieu les Universités de l’Economie de la Fonctionnalité et de la Coopération, une version de la fresque sera proposée. La version finale est prévue à la fin de l’année.

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