Augmentation des prix : quelles conséquences ?

Les ménages en Occident doivent faire face à l’augmentation des prix de l’énergie qui pourrait être durable en raison de la décarbonation de l’économie rendue nécessaire pour lutter contre le réchauffement climatique. La transition énergétique entraîne des surcoûts au niveau des logements avec la nécessité de réaliser des travaux et une augmentation du prix des voitures. La guerre en Ukraine provoque par ailleurs une hausse des prix alimentaires. Pour limiter les effets de cette guerre et de la lutte contre les émissions des gaz à effet de serre, l’État est appelé à mettre en œuvre des compensations notamment en faveur des ménages les plus modestes. L’État providence accroît sa sphère d’influence en étant présent dans les tous les domaines de la vie quotidienne (énergie, logement, transports, vie culturelle, éducation, etc. que ce soit par des aides ou par des crédits d’impôt.

Depuis le milieu de l’année 2021, les augmentations de prix pour l’énergie atteignent plus de 30 %. Ce taux est légèrement inférieur en France en raison du bouclier tarifaire mis en œuvre par le gouvernement. En un an, les prix de l’alimentation ont progressé de 4 à 8 % au sein des pays occidentaux. Les ménages sont également confrontés à une augmentation des prix de l’immobilier. Aux États-Unis, le prix des logements a progressé de 18 % en un an. Pour la zone euro, la hausse est de 11 % et de 7 % pour la France. Les loyers aux États-Unis enregistrent une hausse de 5 % en un an et de 2 % en zone euro.

Les taux d’intérêt réels négatifs pénalisent les ménages disposant d’une épargne investie en produits de taux (épargne réglementée, fonds euros, etc.). En zone euro, la majorité de l’épargne est placée sur ce type de supports. Le rendement réel de l’épargne est négatif d’au moins trois points, ce qui aboutit à une taxation masquée.

Les ménages doivent faire face à une augmentation sensible du prix des voitures. Celui augmente de 3 à 12 % au sein des pays de l’OCDE. Cette hausse est due aux goulets d’étranglement sur certains biens intermédiaires et à la progression du prix des métaux. La construction des véhicules électriques exige le recours à des métaux rares dont les cours ont fortement augmenté depuis le début de la guerre en Ukraine. Plusieurs pays ont adopté des mesures afin de réduire le coût d’acquisition des véhicules électriques. La France a ainsi introduit un système de bonus/malus et de primes pour les voitures électriques.

Le report des achats

Comment les ménages régissent-ils face à ces augmentations ? Au niveau des voitures, ils réduisent leurs achats. La crainte d’un durcissement de la législation sur les émissions des gaz à effet de serre les incite à les retarder. Ils se sont, dans un premier temps, reportés sur les véhicules d’occasion. La hausse du prix de ces derniers conduit depuis quelques mois à opter pour l’attentisme.

Après avoir fortement baissé ces dernières années, le prix des biens électroniques et informatiques est en forte hausse du fait de la pénurie de microprocesseurs. Les achats de ces produits par les ménages avaient fortement augmenté durant la crise sanitaire. Depuis quelques mois, le marché tend à diminuer en raison de la hausse des prix.

Le recul des transactions immobilières

Après avoir atteint des records en 2021, le marché de l’immobilier enregistre un nombre moindre de transactions depuis le début de l’année. La guerre en Ukraine, la hausse des prix et l’augmentation des taux d’intérêt sont autant de facteurs qui conduisent à une certaine forme d’attentisme.

Une demande sociale plus importante au prix d’une perte de compétitivité et de déficits croissants

Aux États-Unis, tout particulièrement, les salariés demandent de plus en plus une revalorisation de leurs salaires. La hausse de ces derniers dépasse 4 %. En zone euro, ce processus commence à apparaître, mais avec un réel décalage par rapport aux États-Unis. Dans les prochains mois, les demandes d’indexation devraient s’accroître, sachant que les pouvoirs publics souhaiteront y échapper afin d’éviter l’engagement de spirales inflationnistes. À défaut d’augmentation des salaires, une pression s’exercera auprès des pouvoirs publics pour multiplier les compensations sous forme de blocages des prix, de crédits d’impôt ou de chèques (énergie, alimentaire, etc.).

L’augmentation des salaires pourrait conduire à une diminution des marges pour les entreprises ne pouvant pas répercuter la hausse des coûts sur leurs prix et ne bénéficiant pas de gains de productivité suffisants.

L’augmentation des coûts pourrait amener à une contraction de l’investissement, ce qui ne faciliterait pas l’obtention des gains de productivité. Le recours croissant aux aides publiques entraînera une augmentation des dépenses publiques et donc, à défaut de réaliser des économies, à une progression des impôts et du déficit public.

Un transfert de l’épargne vers les placements à risques ?

Pour se préserver de l’inflation, les ménages ont tout avantage à transférer leur épargne vers des placements dits risqués dont la détention protège contre l’inflation au détriment des produits de taux. Si une proportion de ménages s’oriente vers les actions depuis 2021, les transferts restent néanmoins limités. Ceux-ci maintiennent des montants élevés de liquidités sur leurs dépôts à vue et sur leurs livrets d’épargne qui sont les plus exposés face à la résurgence de l’inflation.

Le choix du déménagement

Pour réduire leurs charges de logements, les ménages peuvent décider de déménager en privilégiant des villes plus petites à la condition qu’elles soient bien desservies par les transports publics. Le gain de loyer ou de prix à l’achat ne doit pas être réduit par des coûts plus importants pour les déplacements. Le développement du télétravail offre des marges de manœuvre supplémentaires pour le choix du lieu de résidence. Par ailleurs, ces dernières années, les entreprises ont fréquemment déménagé afin de réaliser des économies sur leurs bureaux, habituant les salariés à une certaine forme de mobilité et d’adaptation en ce qui concerne leurs trajets domicile/travail.

En conclusion…

En cas d’absence d’embargo total, les cours de l’énergie, des matières premières et des produits agricoles pourraient se stabiliser, permettant d’éviter l’engagement d’une spirale inflationniste à la condition que les salaires ne soient pas totalement indexés. Le marché de l’énergie pourrait s’équilibrer avec une réallocation du pétrole et du gaz russe. Les Occidentaux devront faire face à des surcoûts de transports et de transformation du gaz liquéfié. Par ailleurs, cette hausse des prix pourrait amener des gains de productivité comme cela a été constaté au Japon après le tsunami qui a entraîné la fermeture des centrales nucléaires en 2011.

Face à la montée des prix, les ménages seront contraints de diminuer leur consommation. S’ils augmentent leur effort d’épargne dans un premier temps, ils pourraient être ensuite obligés de puiser dans cette dernière. La baisse du pouvoir d’achat liée à la hausse des prix de l’énergie pourrait atteindre 1 % en 2022. Avec les produits alimentaires et les autres biens et prestations, la perte pourrait s’élever, avant aides publiques directes, à 3 points. La diminution de la consommation devrait peser sur la croissance des deuxième et troisième trimestres.


Crédit Photo : Can Stock Photo – sbotas

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